Améliorer les thérapies immunitaires ciblées dans le traitement du cancer

Gertraud Orend, chercheuse à l’Institut d’hématologie et d’immunologie, compte parmi les 8 lauréats « Seed Money », l’appel à projet 2020 d’Eucor – Le Campus européen. Protéomique, ciblage in vivo, modélisation informatique… Au côté d’autres chercheurs, elle s’intéresse au microenvironnement tumoral en vue d’améliorer les thérapies immunitaires ciblées pour lutter contre le cancer.
Les thérapies immunitaires ciblées exploitent notamment l’activation des lymphocytes cytotoxiques (LTc) pour réengager la destruction des cellules tumorales. Problème, la méthode ne fonctionne que chez 10 à 20% des patients. Pour comprendre le phénomène, les chercheurs s’intéressent plus particulièrement au microenvironnement tumoral dans lequel les cellules cancéreuses et immunitaires sont organisées au sein d’une matrice extracellulaire spécifique. Cette dernière possède un rôle clé dans la régulation de la transmission du signal entre les cellules tumorales et les cellules immunitaires.
« Dans le cas des thérapies ciblées, les cellules cancéreuses devraient attirer les cellules cytotoxiques mais la tumeur se défend et les LTcs restent coincés dans la matrice extracellulaire », souligne Gertraud Orend qui tente de débloquer ce mécanisme. Pour ce faire, différentes pistes sont testées. Les chercheurs ont identifié un récepteur membranaire CXCR4 qui a un impact sur la réactivation des lymphocytes cytotoxiques. Objectif : étudier comment se forment les complexes de signalisation CXCR4 et comment cela affecte le comportement des lymphocytes cytotoxiques.
Orienter l’immunothérapie
« Pour moduler l’immunité tumorale, nous étudions le rôle de différentes protéines dans ce processus et notamment celui de la ténascine-C, un des composants majeurs de la matrice extracellulaire tumorale. Cette dernière active des voies de signalisation qui bloquent le système immunitaire à l’encontre des cellules cancéreuses », souligne Gertraud Orend, spécialiste du sujet*.
Un travail rendu possible grâce à la mise en commun des compétences des différents chercheurs du projet et de plusieurs technologies : Gertraud Orend pour le ciblage in vivo, Oliver Schilling de l’Université de Freiburg pour la protéomique, Volker Roth de Bâle pour la modélisation informatique. Sans oublier Véronique Orian-Rousseau de Karlsruhe pour l’analyse d’une autre molécule impliquée dans la relation avec les cellules immunitaires, CD44.
Comprendre l’interaction des cellules et de la matrice dans le microenvironnement tumoral permettrait de concevoir des approches nouvelles et complémentaires pour traiter le cancer. « A terme, nous souhaiterions créer un programme permettant d’orienter l’immunothérapie et de l’adapter au patient en fonction des protéines impliquées », explique Gertraud Orend qui précise qu’elle a également obtenu un financement de l’Agence nationale de la recherche pour travailler sur le rôle de ces protéines dans la matrice extracellulaire présentes dans certaines maladies du foie ou associées à l’obésité. Des travaux effectués notamment au côté d’Oliver Schilling et de Véronique Orian-Rousseau.
Marion Riegert
*Lors de publications en 2019 et 2020, Gertraud Orend montre, dans un modèle murin de cancer du sein, qu’avec la présence de ténascine-C la tumeur grossit. Et inversement, quand le signal de la ténascine-C est inhibé, le nombre de métastases diminue.